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En 2024, Le Cercle des Poètes Disparus se met au théâtre !

Dernière mise à jour : 7 mars


Que se passe-t-il lorsque le théâtre vivant décide de s’attaquer à un chef d’œuvre du septième art ?


L’auteur Gérald Sibleyras et le metteur en scène Olivier Solivérès ont décidé de relever le défi en proposant la première adaptation française du blockbuster américain : Le Cercle des Poètes Disparus.


Si de nombreux exemples existent déjà d’œuvres théâtrales adaptées au cinéma – L’Avare

avec Louis de Funès (1980), l’iconique Roméo + Juliette de Bazz Lurhmann (1996), ou encore Le Prénom (2012) – l’inverse est toutefois moins commun.

D’autant que Le Cercle des Poètes Disparus n’est pas un petit succès. Rappelons qu’en 1989, le film avait récolté l'équivalent de 536,6 millions de dollars au box-office ! En comparaison, Oppenheimer fait pâle figure avec ses 400 millions de dollars à la fin de l’été.


Décider d’adapter le Cercle des Poètes Disparus est un pari risqué. Il va de soi que le public

a des attentes. Il faut un professeur Keating charismatique, de jeunes étudiants naïfs et passionnés, un professeur Nolan ‘tradi’ et irritable. Il serait facile de tomber dans l’écueil du

copier-coller. Mais, spoiler alert, Gérald Sibleyras et Olivier Solivérès ont su, avec finesse,

répondre aux attentes du public contemporain et des fans de la première heure en offrant une interprétation fidèle et moderne de ce classique inoubliable.


« Tradition. Honneur. Discipline. Excellence ». Les avez-vous reconnus ? À eux quatre, ces

noms communs forment la devise de la Welton Academy, cette prestigieuse école américaine qui accueille l’histoire du Cercle des Poètes Disparus. Martelés dès les premières secondes et à plusieurs reprises ensuite, ces quatre mots semblent prendre au cours de la pièce une toute autre signification.


« TRADITION » - Une scène, douze coups de théâtre, sept comédiens et un public. Dès le

lever du rideau, aucun doute n’est permis. Ce qui se joue sur scène n’est pas du cinéma mais bien du théâtre.


« HONNEUR » - Mise à l’honneur du texte original et retour de citations emblématiques :

Carpe Diem ! Le talent des comédiens suffit à faire vivre sous nos yeux un texte iconique

revisité par des blagues modernes, des références littéraires françaises et le dynamisme de

comédiens du vingt-et-unième siècle. Le spectateur voyage entre des extraits de Thoreau,

Horace et Shakespeare et redécouvre la poésie sous un nouveau jour. Qui n’a jamais tenté de rapper sur du Rimbaud après tout ?


« DISCIPLINE » - Le talent de la troupe et le professionnalisme des comédiens font de cette

pièce un véritable succès. Le texte est déclamé et entendu jusqu’au poulailler tandis que

l’harmonie de la troupe assure un rythme vivant, la jeunesse et la cohésion de la troupe

empêchant tout temps mort ou ennui. Les changements de décors s’enchaînent avec

dynamisme : les pupitres roulent au sol, les jeux de lumière nous font passer de l’école à la

forêt en un clin d’œil, le feu de bois et les lampes torches rappelleront aux plus aventureux

d’entre nous des expéditions nocturnes en forêt. Tout est fait pour que le spectateur soit

immergé dans la frénésie de la vie lycéenne, entre académisme littéraire et insouciante adolescence.


« EXCELLENCE » - L’excellence. C’est l’ultime ingrédient. Celui nécessaire pour assurer le

succès de cette adaptation. Et l’excellence est au rendez-vous. Nous n’en attendions pas

moins de ces huit jeunes comédiens et de leur professeur émérite, Stéphane Freiss.

Néanmoins, il est important de le souligner. La troupe sait évoluer ensemble pour faire de ce

chef d’œuvre cinématographique un véritable succès théâtral. Malgré son dénouement

tragique, la jeunesse et la candeur de ces étudiants assurent un parfait équilibre entre le

tragique et le comique de la pièce. Le public rit, pleure et reste captivé du lever du rideau à sa tombée.


« Tradition. Honneur. Discipline. Excellence ». À eux quatre, ces mots symbolisent le succès

de cette adaptation qui allie avec justesse la tradition à la nouveauté.


Cette pièce est une ode aux professeurs de lettres, de philosophie, de mathématiques ou de SVT, qui, à un moment donné, nous ont fait voir le monde différemment. Que vous soyez

littéraires, scientifiques, économistes, vous vous retrouverez dans ces écoliers qui bâclent leur travail ou au contraire s’adonnent corps et âme à l’écriture d’un poème ; qui chahutent en cours ou boivent les paroles de leur professeur ; qui s’ennuient d’étudier Shakespeare, ou

s’émerveillent de le découvrir sous un jour nouveau. Parce que s’il y a bien une chose que le

cinéma ne prendra jamais au théâtre, c’est son instantanéité. Chaque soir, le théâtre Antoine propose une nouvelle adaptation de ce classique et chaque soir, la rencontre entre le public et les comédiens renverra chacun à des souvenirs différents.


Enfin, si le texte initial se veut une ode à la littérature et à sa beauté, adapté sur les planches

du théâtre Antoine, il prend une toute autre signification. Le propre du spectacle vivant est de pouvoir être joué et rejoué à l’infini. C’est pour cela qu’aujourd’hui nous pouvons encore

adapter du Molière, du Musset et du Racine. La fiction dépasse la temporalité, l’époque, les

mœurs. Mais ce n’est pas pour autant qu’elle n’évolue pas avec son temps. Hugo a marqué

son époque en faisant voler en éclat la règle des trois unités. Anouilh révolutionne le genre en faisant mourir Antigone sur scène. Sarah Bernhardt marque un tournant en devenant la

première femme à incarner Hamlet et Lorenzaccio. Le théâtre est transgression, modernité,

réactualisation constante. « Le spectacle continue et tu peux y apporter ta rime. » dit John

Keating. Une citation iconique et qui, sur cette scène, prend tout son sens, comme si elle se

déployait au-delà du contexte fictionnel. Cette pièce n’est pas simplement une ode à la

littérature, elle devient un plaidoyer pour le théâtre.


Vous l’aurez compris, les fans ne seront pas déçus, ni même perdus. Face à tant de justesse de jeu, d’amitié entre comédiens, de cohésion de troupe, il est indéniable que le spectacle vivant continu, alliant tradition et nouveauté, nouvelle génération et comédien iconique. Stéphane Freiss incarne un John Keating passionné qui emporte dans son dynamisme, ou parvient à suivre dans leur fougue, huit jeunes comédiens à l’avenir plus que prometteur. Alors, que se passe-t-il lorsque le théâtre Antoine décide d’adapter un chef d’œuvre du septième art ? Il prouve à son public à quel point le théâtre est un art vivant, dynamique et atemporel.


Carpe diem.

Isaure

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